Planète Blanche
D'après
une idée de Jean-Jacques Oppringels, déformée et écrite suivant
mon style propre.
Avec
mes remerciements à Deuxcent Cinquanteetun pour la cohérence des
détails techniques (que j'espère avoir bien compris, ne lui en
voulez pas s'il y a des incohérences :-)
Et
à mon fils pour ses remarques pertinentes.
Suite
à un commentaire bien-fondé d'un ami, je ne mettrai plus de courts
textes sur le blog car cela n'a aucune inutilité mais dans le cas
présent, il y a vingt-deux pages.
Si
je vous ai importuné avec cela, j'en suis sincèrement désolée.
Et
s'il vous plaît, aidez-moi, toutes les remarques négatives sont
primordiales pour mes autres nouvelles:-)
Planète
Blanche
Freebe
a dix-sept ans mais se sent parfois envahie par une lassitude
profonde comme si elle quatre-vingt-dix ans.
Elle
a parfois du mal à respirer, à tenir en équilibre, à dominer les
membres de son corps qui s’en vont dans tous les sens, qui
deviennent dures comme de la roche ou friables comme du verre.
Elle
a des instincts de recul vis-à-vis de certaines personnes qu’elle
rencontre dans la rue, des avertissements de danger, des impératifs
lui suggérant de les détruire.
Freebe
a peur, ne se sent pas de ce monde. Aucun souvenir, le vide quant à
ses relations. Quand elle observe les gens, elle est prise
d’angoisses. Tous ont une famille, des parents, des frères, des
sœurs ou des tantes… un clan pas toujours enviable mais existant,
s’embrassant, se querellant.
Elle,
personne à câliner, à aimer, à embrasser. Un manque énorme mais
chacun de ses sourires passent inaperçus comme si elle était
invisible.
Les
magasins proposent des algues, des insectes, des capsules aux saveurs
différentes qu’elle ne reconnaît pas.
Le
sable lui semble infiniment meilleur, l’eau de mer délicieusement
salée.
Elle
a compris depuis longtemps qu’elle devait se taire sous peine de
passer pour une originale.
Elle
vit dans un studio minuscule, quelques meubles, aucune décoration.
Comment
est-elle arrivée là, qui paye son loyer, comment sait-elle lire,
écrire, avoir des connaissances exponentielles sur le monde, les
matières enseignées?
Pourquoi
s’assied-t-elle et remplit des feuilles blanches d’équations, de
renseignements sur l’univers, pourquoi se projette-t-elle dans
l’espace ?
Dans
quel but?
Pourquoi
est-elle sur terre?
Freebe
se promène le long de la plage. Elle tremble, voit ses mains ridées,
est fatiguée.
Plus
rien n'est pareil à hier. Ce qu'elle perçoit est hallucinant. Sa
vision du monde s'amplifie. Ses yeux deviennent transparents, elle
pénètre dans un monde parallèle. L’eau de mer s'évapore, le
sable se transforme en blocs durs. Ni roches ni galets mais des
pierres rouges incandescentes. De l’autre côté du miroir, une
combinaison thermique l'enveloppe pour la protéger. Personne autour
d'elle.
Les
édifices s’effondrent et deviennent une masse gluante absorbée
par le sol, font des inégalités profondes, des trous vastes
impossibles
à
franchir.
Elle
discerne les forêts détruites, asséchées, les arbres couchés sur
le sol, n'y voit aucune coupure, juste le tronc ridé, les
animaux agonisants, les humains allongés sur le sol, exsangues. Les
champs de blé ont disparu, la flore également...
Les
montagnes perdent mètre par mètre, pétrole, plastiques, les
richesses de la Grande Barrière explosées.
Les
glaciers fondants, un cauchemar pour l'humain, la flore, l'animal.
Les
volcans sont en surexcitation. Des émissions de lave, des émanations
de gaz rendent l'air irrespirable.
Vision
apocalyptique.
Un
homme est derrière Freebe, jeune. Il fait son jogging matinal et
s’arrête net.
Quelque
chose d'étrange se joue sous ses yeux, une femme au corps jeune et
au visage ridé ferme les yeux, bras ouverts.
Il
n’ose l’approcher mais se sent lié à elle d'une façon qu'il ne
sait pas expliquer. Il sent qu’elle est en danger, qu'il a une
disposition naturelle à la protéger.
Les connaissances bouillonnent à l'intérieur d'elle.
Elle
court de longues foulées, se réfugie dans son studio,
Toujours
les mêmes questions : pourquoi, pourquoi cet isolement?
Quels
présages lui envoie-t-on ?
Elle
entend des murmures partout.
Qui
parle, qui s'introduit dans son esprit, qui lui envoie des images de
massacres, d'éclatement de la terre.
D'un
pas tremblant, elle va vers la mer, s'abreuve et se nourrit.
L'homme
est là alors que dix minutes plutôt, il se promenait au centre de
la ville. Le spectacle est ahurissant. Les mains de la jeune femme
deviennent translucides au fur et à mesure qu'elle engloutit les
éléments de la nature.
Freebe
se transforme, ses yeux deviennent encyclopédie.
Elle
assimile tous les livres, les documents sur Internet, les recherches
de la NASA classées top secret.
Plus
aucun sens à la vie sur terre, la vision d'un avenir mort, les
tremblements de terre.
Elle
a du mal à respirer, manque d'oxygène, se sent faiblir.
Elle
sait qu'en elle se renferme l'apocalypse, que sa durée de vie sur
terre sera de courte durée.
Freebe
va à l'Observatoire royal.
Elle
voit l'écran géant de la galaxie, un milliard d'étoiles.
Beauté
infinie. Une pluie d'argent, de diamants volant dans l'espace
immortel dont elle s'imbibe.
Elle
comprend le but de sa mission, la raison de sa transformation. Sauver
la planète Terre vouée à s'éteindre peu à peu, protéger tous
les humains, ce qu'il restera du monde animal, de la flore.
La
seule connaissance qu'elle ignore, est le délai qu'il lui est
accordé pour trouver une autre planète habitable, les planètes
inconnues du système solaire.
Freebe
continue à lire, absorbée sans se rendre compte de la présence de
l'homme.
Il
la suit comme son ombre, partout. Il ressent ce qui s'agite à
l'intérieur de Freebe. Son besoin d'amour, sa tendresse à donner et
peu à peu ses sentiments pour elle deviennent clarté, tendresse.
Freebe
aime la poésie, la musique, les photos en noir et blanc qu'elle voit
ou entend lors d'une promenade dans la rue. Dans sa poche, toujours
la même poésie, trouvée par hasard sur une table de bistrot. Aucun
nom. La poésie parle de nuages,de pluie, de cieux, de planètes.
Elle
a toujours été en relation avec les débordements qui se dévoilent
dans la nuit profonde.
Elle
aime la beauté.
Freebe
se dépêche avant la fermeture de la bibliothèque royale.
En
filigrane sur les murs, le centre de la terre, un enfant dans le
ventre de sa mère.
L'humanité,
inconsciente, s'amuse, pleure d'histoires d'amour, jouit de
sensualité mais aussi, meurt de faim, de guerres, d'épidémies...
Ses
forces diminuent très lentement. Elle se cogne contre les murs comme
enfermée dans un filtre dont elle ne sait pas sortir.
Elle
est prise de tremblements irrépressibles.
Une
longue expédition, un cheminement vers une paix universelle, une
régulation des religions, l'opulence abolie entre les riches et les
pauvres, une écologie drastique, la couronnement de sa mission.
Impossible
sur terre.
L'homme,
derrière elle, patiente.
Freebe
s'enferme.
Derrière
les cloisons de la cave de la bibliothèque, il y a dix cartons de
livres à enregistrer, à classer par les employés qualifiés.
Elle
sait qu'il lui manque un élément important et cherche. Cette
fraction minimale vient des temps anciens. Quoi, aucune idée.
Elle
doit trouver une planète habitable.
Où
chacun pourra se reconstruire.
Prendre
le bonheur dans un autre ciel, une autre terre plus ou moins fertile
mais des étendues à fouler comme le sable d'ici.
Freebe
rêve... Musiques, banjos, guitares, harpes, pianos... Étonnants
entremêlements qui lui viennent subitement en rêves.
Un
monde incertain, traduit seulement par les télescopes, les calculs,
le mécanisme humain, comprendre, aller de plus en plus loin dans
l'absolu inconnu.
Freebe
songe.
Une
arche de Noé des temps modernes... Un milieu harmonieux où elle
sait qu'il y a une place quelque part pour les accueillir.
Avec
toutes les données accumulées, elle sait que la terre sera bientôt
éclatée.
Des
millions de planètes mais une seule idéalement positionnée par
rapport à son étoile, aux dimensions compatibles à celle de la
Terre et rocheuse.
Où
se trouve-t-elle ?
Elle
décide d'aller dormir quelques heures.
Ses
yeux clairs ont un éclat particulier, une intelligence hors du
commun.
Elle
se trouve dans une classe vide. Un tableau blanc, des craies.
Équations
sur équations, absorbée.
Elle
ne voit pas les scientifiques autour d'elle qui supputent sur la
vraisemblance de ses écrits.
Les
rumeurs sont parvenues jusqu'à eux.
Comment ?
Nouvelle énigme.
Freebe
ne les voit pas.
Elle
écrit, calcule, pense, efface. Une vitesse folle, elle murmure, est
dans un état second.
Millimètre
par millimètre, elle crée son regard d'approche.
Elle
va avoir besoin d'aide. Ne saurait pas réaliser la tâche toute
seule. Des années d'études, elle n'a pas le temps.
Les
gens du planétarium. Eux seuls avec l'aide des autres nations. Ils
ont dû s'apercevoir de la catastrophe qui plane sur la terre tel un
vautour autour de sa proie.
Des
infos ont été répandue via les médias mais ils se sont tus sur
pas mal de choses.
A
nouveau, Freebe mue.
Elle
se transforme en Caverne Bleue.
Voit
une rue sombre alors qu'il est treize heures. Personne. Des bâtiments
gris à moitié renversés, abandonnés, plus aucune végétation.
La
plage, la mer devenue étendue sèche.
Plus
de restos, de bars, solitude absolue.
Fin
de la terre.
Hallucinations,
elle titube, est faible, impuissante. Elle est confinée dans la
Caverne, il faut qu'elle retrouve son apparence.
La
conscience de son immatérialité sur terre.
Ses
mains se rident et redeviennent lisses, immédiatement.
Elle
mange, boit, s'assied, épuisée.
Elle
sent une main sur son épaule. Elle sursaute, se retourne, voit
l'homme.
Elle
perçoit la tendresse, la complicité dans les yeux bleus.
Serait-ce
lui qu'elle attend ?
Il
la prend dans ses bras, l'enlace doucement.
Elle
se sent bien comme elle n'a jamais été.
-
Il me semble te connaître. Tu es chargé de veiller sur moi ?
Qui es-tu ?
-
Je suis Aran. Je vais prendre soin de toi. Nous allons vivre vivre
ensemble, ne jamais nous quitter d'une semelle.
-
Qui t'a donné les consignes ?
-
Un matin, j'ai su, je t'ai vue dans ma chambre. Une vision. Des
pensées, des voix, des rêves qui m'ont conduit jusqu'à toi.
-
Est-ce que tu sais pour la Terre ?
-
Oui, je sais, la destruction totale.
Ils
se dirigent vers le planétarium.
Ils
montent au cinquième, le plus prêt possible des étoiles.
Pas
inconscients sur la dangerosité de leur mission mais complices, un
fin de solitude pour Freebe, une poussée en avant pour Aran.
Les
astrophysiciens, des jeunes, acharnés devant leurs écrans en grande
dimension. Matériel plus sophistiqué, télescopes géants, planètes
que l'on peut toucher du doigt.
Les
ingénieurs vont d'une machine à l'autre, ils parlent peu.
Ils
ont des formations scientifiques différentes, créent et croient à
la sérendipité qui va peut-être leur donner une découverte dans
un autre contexte de circonstances.
Aran
et Freebe se dirigent vers eux.
Freebe
assimile le tout d'un balayage des yeux.
Un
homme les regarde. Il s'interroge sur leur présence.
Aran
et Freebe le rejoignent et commencent à expliquer depuis le début
l'histoire qui se joue à l'insu des humains.
-
Nous vous attendions...
-
Comment ça ?
-
L'équipe vous a repérée devant le tableau blanc.
-
Où étais-je ?
-
Dans un laboratoire hautement scientifique qui vous a projetée
vingt ans en avant, le moment où la terre se dégradera de façon
phénoménale
-
Vous saviez. Vous avez des solutions ? Des facilités, des
collaborations avec d'autres pays ? Nous avons vingt ans maximum
pour la trouver.
-
Il faut des moyens faramineux pour se lancer dans cette recherche. Je
ne sais pas si l'ensemble des nations seront amènent d'y collaborer.
Difficile, inéluctable, je pense.
-
Nous n'avons que des notions mathématiques, rien de concret,
interrompt un scientifique. On étudie ce phénomène depuis des
décennies et quasi rien de nouveau à ce sujet. Et si une planète
existe, la possibilité de retour est actuellement impossible. Qui
envoyer les premiers ? Pas les chercheurs. Nous en avons trop
besoin.
-
Je pourrais y aller seule ou avec Aran s'il est d'accord. Et chercher
une planète très semblable à la nôtre. Le contact entre nous
devrait rester possible. Et la possibilité de retour aussi. Je le
sais au fond de moi, j'ai des pouvoirs dont je ne connais pas
l'origine. Tout ce je sais, est que je ne suis pas une terrienne.
-
Comment cela, pas une terrienne ? Comment le sais-tu, demande
Aran ?
-
Je le sais, j'ai été propulsée ici, pour vous aider.
-
Mais tes sentiments....
-
Je sais mais je mange aussi du sable, boit de l'eau de mer, me
transforme, me sent vieillir...
-
Et nous, notre complicité..
-
Je ne sais pas Aran, je ne sais pas.
-
C'est de la science-fiction, s'oppose un membre dubitatif. Nous
n'avons jamais abouti ! Il faut dépasser Mercure !
Pensive,
elle s'éloigne. Elle doit trouver. La douleur qui s'empare d'elle
peu à peu se fait violente. La tête, les bras, les jambes. Elle
manque de sable, d'eau, elle doit retourner vers la côte.
Aran
la suit. Leurs yeux changent, d'une brillance étrange.
L'évolution
est la raison d'être des scientifiques. Pas de famille, pas
d'enfants, tout entiers tournés vers le cosmos. Les nouvelles
connaissances, les défis de la science en font des êtres écrasés
de sciences.
Les
Robots ont changé depuis leurs débuts. Leurs mains deviennent
bleues fluorescentes pour détecter toute évolution dans l'univers.
Ils parlent et parfois, se glissent dans leurs regards, des
sentiments. Une intelligence
artificielle phénoménale et les Robots transmettent leurs savoirs à
l'homme mais ce n'est pas suffisant.
-
Laissez-nous trois jours, impose le Maître. Nous contactons les
grandes puissances.
Aran
et Freebe sont dans le parc. Ils se taisent.
Des
projets plein la tête d'Aran, il veut être spécialiste dans
l'évolution des Robots. La performance à atteindre et il ne sait
comment va évoluer son futur. Vingt ans sur la Terre, ne pas avoir
le temps nécessaire. Seulement aimer Freebe qui n'est pas humaine et
lui est comme une seconde peau.
Leurs
yeux se font sensualité, rêves, désir et jouissance. Vivre les
trois jours comme les derniers de leur existence.
Leurs
mains s'unissent.
Ils
se lèvent en direction de l'appartement d'Aran.
Ils
n'en sortiront que trois jours plus tard.
-
Vous pouvez partir, dit le Maître si vous êtes toujours d'accord.
-
Nous le sommes.
-
Vous serez quatre, plus les Robots et les drones.
Les
Robots ont la mission de vous protéger. Vous voyagerez dans
l'espace-temps où l'espace est courbé pour parcourir des distances
énormes en un rien de temps. Nous avons découvert une planète
blanche, quatre en fait. Par hasard, en mettant ma main parallèle à
Mercure.
-
Je sais, dit Freebe, je les ai vues cette nuit. Mais je ne sais pas
laquelle sera habitable. Je cherche.
Ses
yeux deviennent lumière aveuglante, impossible à regarder. Sa peau
mute, en écailles, entièrement. Elle éclate en molécules, en
atomes. Elle tremble, murmure la langue étrangère. Ils entendent
mais ne comprennent rien. Elle est en transe.
-
Stop, Freebe ! Arrête ça immédiatement, nous avons besoin de
toi ! Stop, hurle le Maître en la secouant. Trop tôt, beaucoup
trop tôt !
Les
écailles tombent, sa peau peu à peu, redevient blanche. Seuls les
yeux gardent l'éclat.
-
Quand partons-nous ?
-
Les techniciens travaillent d'arrache-pied. Reposez-vous.
-
Qu'allons-nous faire, Aran ? En attendant ?
-
Dors un maximum, que les rêves t'envahissent et que les
connaissances viennent à toi de plus en plus précises.
-
Et toi ?
-
Je veillerai sur toi, te donnerai les forces nécessaires. Du sable,
de l'eau.
Elle
le regarde, l'aime. Des sentiments humains lui ont été donnés.
Malgré les révolutions, les guerres déclenchées par les
religions, l'ère des Robots, les humains qui deviennent complètement
indifférents les uns par rapport aux autres, elle se sent envahie
d'amour pour Aran.
La
similitude des sensations, la compréhension.
Ils
s'embrassent tendrement avant que Freebe ne se couche et s'endorme.
Son
visage se contracte. Aran lui prend la main.
Elle
rêve de la Caverne Bleue avec des flashmètres pour mieux guider la
population à venir.
Des
milliards d'humains mais aussi des animaux dans un temps migratoire
qu'elle ne peut définir.
Il
faudra emporter des composantes nutritionnelles pour comparer mais
aussi des extraits de roches, des flacons d'air, des combinaisons
thermiques. Il faut aussi pallier au fait que le vaisseau dépassera
les rayons du soleil et trouver une autre source de propulsion comme
le mécanisme classique des réacteurs des avions qui au lieu de
compresser l'air, compresseraient la matière sombre.
Freebe
s'enfonce plus loin encore. Comment avoir le matériel nécessaire si
celui emporté est détruit ?
S'ils
s'engouffrent par erreur dans le Tunnel noir vers la destruction
totale ?
Freebe
devient bleue à nouveau. Frémissement de tous les membres, yeux
ouverts rouges. Lévitation.
Aran
n'ose plus la toucher.
Freebe
voit des êtres ressemblant aux humains. Oreilles courtes, lèvres
juste en-dessous de la paroi nasale comme pour mieux inspirer. Des
arabesques de fumée blanches s'échappent d'eux. Grands, un
mètre-quatre-vingt-dix pour le moins. Les habitants sont paisibles.
Freebe
voit des multitudes de détails de la Planète. Des maisons de
trois-cent mètres carrés. De l'eau en cascade, partout.
Des
arbres, racines vers le haut, des fleurs neigeuses, les terres macro
synthétiques pour la résistances aux chocs, pour empêcher la
fissuration suite aux coups de météorites.
Terre
orangée, Freebe devient orange, devient terre devient arc-en-ciel.
Écologie,
hydrobiologie, Freebe découvre l'anoxie, une espèce de boue avec
une diminution de l'oxygène dissout ou présent dans le milieu du
sol.
Elle
passe d'une planète à l'autre . Aucune semblable. Pas d'étoile
rouge.
Les
fonds nécessaires à une pareille expédition ?
Dans
la durée de l'espace-temps, il leur faudrait 120 jours. Mais
l'intervention des Robots va jouer. Les scientifiques bénéficient
de technologies hautement développées que le commun des mortels ne
comprendrait pas. En deux mille sept-cent, inimaginable.
Actuellement,
quasiment aucune limite.
Elle
revient à la Planète Blanche et décide de miser le tout pour le
tout et de s'y rendre.
Freebe
ne se réveille plus. Sa respiration est sifflante, ses jambes, ses
bras demeurent immobiles. Elle mue, sa peau devient aveuglément
blanche.
Inquiet,
Aran appelle le Maître.
-
Depuis combien de temps est-elle dans cet état ?
-
Plus de notion de temps dans cette pièce.
-
Le blanc, depuis combien de temps ?
-
Pas longtemps.
-
Trois jours, plus, moins ?
-
Je ne sais pas. Les vaisseaux sont prêts ?
-
Les robots sont prêts, les drones aussi, les vaisseaux, matériel...
Il faut que Freebe se réveille. Ne la quittez pas, elle sera
différente, proche d'un Robot. Plus elle deviendra blanche, plus
vite, elle se réveillera.
-
Sinon ?
-
Elle va mourir.
Aran
pleure. Sa déesse s'en va ailleurs. Elle mue sans cesse. Comme posée
sur des nuages de soie. Il ne sait comment faire pour la retenir.
Ils
auraient dû s'enfuir. L'aimer encore davantage.
Parfois,
il met la musique à plein volume en espérant qu'elle murmure
d'arrêter ce tintamarre.
Il
baisse le son, lui fait avaler le sable et l'eau et se prépare une
pizza. Les trois quarts à la poubelle.
La
peau de Freebe est lisse. Translucide. Il n'a même plus envie de lui
prendre la main. Ce n'est pas sa Freebe. Elle éclatait de bonheur,
de suavité, de sensualité à ses côtés. Se lovait dans ses bras,
le caressait et doucement, ils sombraient dans le sommeil.
Aran
sort. Besoin d'air, il devient fou.
Il
se promène sur la digue, regarde les grands oiseaux blancs voler.
Il est au sommet d'une falaise, observe les dénivellations, les
roches brunes. Le brouillard tombe. La pluie, tout à coup,
ruisselle. Des torrents d'eaux alors que trois mètres plus loin, le
soleil brille. Glaciale, l'eau. La grêle s'abat, claque sur sa peau.
Il
voit ses mains, blanches, sans aucune tache. Il comprend
immédiatement.
-
Freebeeeeeeeeeeeee, hurle-t-il, Freebeeeeeeeeeeeeeeeeee.
Il
court comme un fou, ouvre la porte, la voit dans le lit, délavée,
blême, crayeuse comme la lune mais d'apparence humaine.
Il
s'agenouille, la prend doucement dans ses bras, la couve du regard.
-
Oh, Aran, qu'est-ce que tu fais debout à cette heure ? J'ai
encore envie de dormir.
Fou-rire
d'Aran. Il la prend dans ses bras, la colle contre lui, la promène
dans tout l'appartement en riant. Pas plus lourde que trente-cinq
kilos.
Freebe
ressent Aran à l'intérieur d'elle-même. Dans ses tripes, son
ventre, ses jambes mais sait qu'il a perdu le pouvoir de la protéger.
Titubante,
elle se dégage et passe devant le miroir.
-
Déjà, murmure-t-elle. Le rouge de mes joues, les variations de
couleurs, les poils sur ma peau ? Mes cheveux !
Sa
fin se rapproche dangereusement.
Elle
va dans la cuisine, se renverse du café sur la main. Il s'évapore
immédiatement, un nuage désagrégé. Se rend compte que pour elle,
tout l'appartement est transparent. Elle peut voir au-delà des
cloisons.
Elle
lève la tête. Plus d'étages. Une immense pièce où les gens
semblent flotter, ondoyer. Une immense pièce où il n'y a pas de
fond, pas de surface.
Elle
est seule à percevoir, à comprendre. Son pouvoir a triplé,
quadruplé et des centaines de fois plus. Des impressions plus
larges, aucune idée de l'époque où elle se trouve. Hors de
l'espace-temps.
Aran
lui explique sa dernière métamorphose.
-
Il est temps, Freebe de rejoindre le laboratoire. Ils nous
attendent.
-
J'ai peur. Je n'ai plus de forces.
-
Viens dans mes bras.
-
Quel âge as-tu ?
-
Vingt-sept ans
-
Et moi ?
-
Je ne sais pas.
Le
laboratoire.
Les
yeux de Freebe sont lance-flammes rouges, embrasement spatiale et
temporelle, dont les humains doivent se protéger.
-
Le vaisseau est prêt, dit le Maître. Les Robots enverront les
messages sur terre en trois minutes maximum. Les drones vous
protégeront d'attaques possibles.
Vous
superviserez le tout et si Freebe devient Caverne Bleue à nouveau,
vous sortirez dans l'espace pour déterminer ce qui se cache
derrière, la qualité de la terre, la présence d'eau et d'oxygène.
La présence d'autres individus peut-être, la flore, la faune.... Et
surtout, la planète blanche.
-
Tout est réuni en un cercle, dit Freebe. Je vois des hommes, des
enfants dans un bonheur extrême. Je vois cet endroit mais je me suis
réveillée trop tôt. Je ne sais pas les situer mais ils existent.
Il y a une étoile rouge. Nous chercherons et nous trouverons. Le
ravitaillement, des capsules. Du sable et de l'eau pour moi-même.
-
Encore un détail très important dit le Maître, en regardant Freebe
et souriant pour la première fois.
Il
montre les combinaisons. Un assemblage blanc fin et léger avec
des arabesques de blanc et de noir résistant aux températures
extrêmes.
La
visière, gris foncé.
-
Ces combinaisons vous permettront de déjouer la dépressurisation.
Vous aurez constamment une pression satisfaisante. Il a été testé
en double pression ce qui maintiendra une température constante et
la pression basse. De l’oxygène en suffisance et l'évacuation de
l'humidité corporelle. La possibilité de l'enlever trois heures par
jour.Vous avez des questions ?
-
Non...
-
Nous ne savons pas l'âge de Freebe. Dix-sept ans ne veut plus rien
dire avec ce que nous savons. Vous risquez de mourir dans le
vaisseau.
-
Je vais y mourir mais je trouverai la Planète Blanche avant.
-
Même en restant parmi nous ?
-
Oui.
Aran
est décomposé. Sort de la salle, il n'en peut plus. Il regrette
d'avoir été choisi comme protecteur. Il aime Freebe, une
non-humaine qui va mourir. Il hurle à l'intérieur de lui.
Impossible cette union, a envie de s'enfuir mais il a promis. Il doit
tenir, se taire, faire semblant. Pourquoi ces gens d'une autre
planète ont-ils donné dix-sept ans à Freebe ?
-
Voici le vaisseau spatial, dit le Maître. Il ressemble à un avion
d'une période lointaine qui compressera la matière sombre.
Freebe
observe, devient noire avec des zones de lumière dispersées. Elle
est étoile rouge. Des habitants l'appellent, étranges mais
bienveillants. Elle se laisse emporter par leurs sourires, vogue, est
dans un état hallucinatoire.
Elle
voit un homme, nu.
Le
dialogue s'installe entre eux.
-
Je t'en prie, laisse-moi voir où tu te trouves précisément.
-
Non, Freebe.
-
Les gens qui m'accompagnent sont pacifiques. La Terre est condamnée.
-
Je sais, je vous observe. Redeviens humaine, Freebe, tu auras besoin
de force. Quitte cette enveloppe qui te cache aux humains. Sois
Freebe avec cette capacité exceptionnelle d'extrapoler.
Ils
sont partis, montés un à un, vêtus de blanc dans le vaisseau.
Les
ordinateurs sont en place, télescopes, techniciens à l'écoute.
Trois jours se sont écoulés. Concentration maximale des ingénieurs
mais aucun bruit, aucune fréquence. Le vaisseau est silencieux,
disparu. Ils savent que sa vitesse est phénoménale, plus grande
encore que lors des expéditions vers Jupiter, Saturne et autres
planètes lointaines.
Les
drones contribuent et l'infini se rapproche de manière vertigineuse.
Les
Robots se parlent entre eux, la langue étrangère que Freebe
comprend.
«C'est
une expédition folle.... mission quasi impossible, espace-temps
qu'ils traversent à une allure infernale, leurs cerveaux vont
éclater ».
Il
y a des soubresauts dues à l'allure effrénée... les vents
stellaires.... les comètes les effleurent.
En
quelle année sont-ils ? Impossible à définir.
Les
trous de ver remplissent leurs rôles à merveille.
Freebe
songe. Elle a oublié les musiques qu'elle aimait le peu de temps de
son passage sur terre. Elle commence à comprendre l'isolement dans
lequel ils sont. Animée par la force puissante qui ne lui laissait
aucun moment de répit pour aller à la recherche de la Planète
Blanche, elle a oublié les connaissances apaisantes.
Elle
attend le passage des Robots pour s'alimenter, pour discuter avec eux
du merveilleux espace qui s'offre. Étoiles miroitantes, planètes en
mouvement, elle vit dans une lumière artificielle jamais perçue
auparavant. Les mondes parallèles lui offrent de quoi se définir,
d'entrer dans l'autre dimension d'elle-même. Elle a vu son double,
une impression différente du miroir. Un double de l'homme nu.
Aran
lui sourit, il sera bientôt l'heure de se débarrasser de la
combinaison. Aucune intimité entre eux sauf s'embrasser
délicatement. Plus aucune envie de la part de Freebe sauf celle de
la tendresse. Pour combien de temps ? Elle sent lentement les
connaissances s'amoindrir.
Elle
enlève la combinaison. Mal de tête atroce, ses jambes se dérobent,
elle ne contient plus ses mouvements. Ce sont les prémisses de sa
mort prochaine.
Ils
vont en deçà de leurs vies, dans la profondeur de leur hibernation,
dans les cellules innovantes de leurs vies. Sa peur augmente, lui
retirer ce qui lui a été donné. Elle est naissance et mort. Elle
écrit quelques mots sur une page, abandonne. Vidée de mots, elle va
au hublot et imprime les éléments à sa façon.
Ils
approchent de Pluton. Freebe est Robot. Se cache en elle pour
quelques minutes à peine un ensemble de conjonctures, de
contradictions, de peurs.
Qu'auraient
fait les humains sans cet amoncellement de connaissances qu'elle
abrite encore à l'intérieur d'elle ? Elle ne doute absolument
pas que les scientifiques y seraient parvenus mais dans combien de
temps ? L'urgence de la situation la fait paniquer.
Dépasser
Mercure pour rencontrer l’Étoile Rouge. Et ne savoir absolument
pas où se trouve cette étoile. Elle examine les écrans. La partie
de l'espace à découvrir est inconnue, par tous, par elle-même
aussi. Elle doit à nouveau muer, se coucher, dormir et laisser les
images l'envahir.
Elle
flotte. Depuis des heures. Sa transformation est incroyable. Même
pour les Robots. Devant tous, naît une pieuvre autour d'un halo
d'eau. Impossible de toucher, de goûter le liquide, la pieuvre
s'échappe constamment en se propulsant dans un autre coin. Elle
change de couleurs, de silhouettes.
Supra
intelligente, avec une mémoire exceptionnelle, elle se rapproche des
hublots constamment. Elle se couvre dès lors de taches, de pustules,
de petites cornes.
Personne
n'ose l'approcher sous peine d'être aspergé d'encre. Comment la
nourrir ? Aucun crabes, aucun coquillages....
Aucune
alimentation ne peut lui être donnée.
Lâcher
la pieuvre décomposée dans l'espace serait-elle plus douce à l'âme
qu'un Robot en n'ayant aucune certitude de devenir étoile
brillante ? Aimait-elle Aran au point de lui donner une dernière
vision qui n'ait plus rien d'attirant.
L'intervention
des Robots. Ceux-ci font barrière afin que personne ne puisse
approcher Freebe. Ils ont compris. De quelque manière que ce soit,
ils sauront quelle direction prendre.
Le
vaisseau se rapproche de Mercure, des turbulences qui les propulsent
d'un côté à l'autre des parois. Les combinaisons sont minces. Les
humains ont mal mais se taisent.
Mercure
apparaît. Les combinaisons sont prévues pour se protéger de la
chaleur intense qu'elle dégage. Mais Freebe, dans sa bulle, comment
va-t-elle réagir ?
Un
morceau de bras tombe. Ils savent qu'ils approchent de la fin du
voyage. La vitesse augmente encore, ils commencent à manquer
d'oxygène. Freebe indique d'une tentacule la direction à prendre.
Le vaisseau obtempère immédiatement. Des planètes inconnues
apparaissent. Multicolores. Spectacle féerique. Un arc-en-ciel dans
l'univers.
Aucun
télescope ne les ont détectées, trop éloignées.
Aran
regarde Freebe. Elle inspire la répulsion. Il se détourne, pas
possible que ce soit sa Freebe à laquelle il a fait l'amour des
heures durant où l'échange était physique et spirituel. L'un à
l'autre. L'un dans l'autre. La transmission de pensées. Parfois, il
entend faiblement sa voix : « Fais ta vie Aran, tu vas
m'écarter de ta vie. »
Il
est dans un désarroi profond. Des ondes de chaleur, de sueur le
terrassent et l'oblige à s'asseoir. Il sent son cœur s'agiter,
s'accélérer, jamais il n'oubliera Freebe. Pour la première fois,
elle se trompe.
Freebe
est la connaissance et le sentiment temporaire, lui est le sentiment.
L'évidence lui saute aux yeux. Elle l'a aimé, il en est certain
mais elle a aimé aussi l'humanité tandis que lui n'a aimé qu'elle.
Elle
était sous sa protection et il a échoué. Il ne sait plus endiguer
le cours des choses, plus moyen de faire marche arrière. Une fois la
planète trouvée, elle sera une flaque gluante et lui, humain. Ne
supporte plus de la voir ainsi. Il compte en heures, en minutes le
moment où ils arriveront.
Envie
d'y être, que ce cauchemar amoureux se termine.
Il
s'endort, manœuvre des Robots qui connaissent ses sentiments.
Effervescences,
bouches bées, sourires, peurs multiples. L'étoile rouge leur envoie
des rayons vers lesquels ils sont propulsés. Nausées des humains,
transformation des Robots, ils ont le visage plus lisse, plus serein.
Un
d'eux prend la main d'Aran, le réveille.
Une lumière blanche, encore lointaine apparaît. Ils atteignent leur
but ultime. Impossible que cette planète ne soit pas celle qu'ils
cherchent. Freebe se décompose de plus en plus et forme une masse
gluante. L'odeur est irrespirable. Les Robots l'emballent doucement
et la mette dans une cavité qu'Aran n'avait jamais vue. Tout avait
été prévu.
Le
tunnel blanc se dessine devant eux. Le vaisseau ralentit, s'avance
dans un long blanchissement où aucune Étoile est. Blancheur
immaculée, vierge, vide de signes de passage d'autrui.
Soudain,
un autre monde, le monde qu'ils cherchaient. Des silhouettes
évoluent, longues d'un mètre quatre-vingt-dix, filiformes, des yeux
étranges, des bouches en-dessous des narines.
La
vision de Freebe.
Ils
n'ont aucun vêtements et les femmes se distinguent par des petits
seins. Ressemblance absolue entre eux. Les enfants ont toutes leurs
caractéristiques. Aucun moyen de les reconnaître, ils sont tous
pareils.
C'est
un cheminement vers l'égalité. Ils dansent plutôt qu'ils ne
marchent. Émotion pure. Leurs bouches verdâtres sont un sourire,
leurs mains aux trois doigts se tendent vers eux.
Des
repas sont posés sur des corolles comme s'ils les attendaient.
Amour, paix, sérénité....
Des
bassins d'eaux aux couleurs mauves, d'arbres entrelacés entre eux,
des maisons gigantesques dont la plupart semblent vides mais en
excellent état. Et des plaines à l'infini d'une couleur jaune fluo.
Le ciel, beige, le soleil vert.
Les
Robots quittent le vaisseau. Un air pur, sans pollution aucune. Ils
font signe aux humains de descendre.
Calme
incroyable. Une sensibilité surnaturelle se dégage. Ils sont dans
le respect profond de la nature, de l'être, de leur différence.Tout
se découvre, tout est à portée de main.
Les
êtres, les XOOERF, comme les appellera Aran, approchent. Aucune peur
de part et d'autre. Seul le sentiment de découverte, de toucher, de
se mêler à eux.
Aran
n'est plus rien. Une absence.
Si
sa Freebe voyait le résultat de sa réussite, humblement, il en est
certain, elle s'approcherait d'eux et se collerait à eux en signe de
reconnaissance. Elle était l'un d'eux.
Ils
mangent ensemble. Délicieux mets aux saveurs totalement inconnues
qu'ils ne savent pas définir. Les Robots continuent à se nourrir de
pilules. Les XOOERF mangent avec leurs mains.
Les
humains savent qu'ils s'adapteront facilement. Toutes les
connaissances sont innées à ces habitants. Ils commencent à
discourir en anglais, français... Ils parlent sciences, écologie,
physique, mathématiques.... Tout leur est acquis, tout ce qu'ils ont
à leur disposition sur la planète se transforme sous leurs mains.
Ils les emmènent vers des habitations où sont soigneusement rangés
des machines hautement plus puissantes que celles sur la terre. Mais
sans vanité, sans orgueil.
Aran
demande aux XOOERF si eux aussi peuvent se transformer et l'un d'eux
a immédiatement une apparence humaine.
-
Pourquoi Freebe, demande-t-il ?
-
Elle était la plus douée, elle s'est proposée.
-
Mais elle en est morte !
-
Je sais, je suis désolé mais nous n'avions pas d'autres choix pour
vous sauver. Nous avons une existence de vie de cent ans. Chez nous,
elle avait quatre-vingt-dix-neuf ans
Que
va-t-il faire dans ce monde qui n'est pas le sien sans Freebe. Il
sait qu'il est l'homme d'une seule femme, qu'il ne saura jamais en
aimer une autre, qu'il n'aura plus aucune envie de faire l'amour. Une
solitude absolue. Retourner sur terre et rester là-bas sur une
montagne à observer le monde et sans jamais en descendre ?
Méditer sur ce qu'il a vécu, ses erreurs, ses bien-fondés ?Vie
solitaire jusqu'à l'éclatement de la terre.
-
Chez nous, nous avons des terroristes, des gens sans scrupules, des
malfrats, des violeurs....
-
Je sais. Ils ne viendront pas. Vous allez repartir avec une formule
d'épuration, de non-conservation. Ce n'est pas à discuter.
-
Et les menteurs,les fraudeurs...
-
Nous y réfléchissons. Un espace clos d'où ils sortiront épurés.
-
Ma vie sans Freebe, impossible. Je vous en prie, désagrégez-moi.
-
Nous le savions. Une vie sans amour ne vaut pas la peine d'être
vécue. Tous, ici, nous nous aimons sans partage, sans infidélité.
L'amour total, l'amour qui nous fait vivre, sourire. Lorsque l'un de
nous meurt, l'autre suit.
-
Et les vaisseaux, demande un scientifique.
-
Les Robots les construiront en un temps record, dix ans maximum.
-
Et dix ans après, la destruction de la Terre...
-
Nous repartons quand ?
-
Quand vous le désirerez, reprenez d'abord des forces.
Freebe,
mon amour,
Ici,
c'est un monde sans toi, sans aucun souvenir de toi.
Je
t'aime comme l'absurde.
Tu
es mon âme, ma vie, ma liberté, ma pensée.
Je
me nourris de toi, tu es ma faim inextinguible.
J'embrasse
chaque parcelle de toi, chaque molécule, chaque pensée, chaque
souveraineté.
Viens
me caresser les cheveux doucement de là où tu es.
Je
t'aime.
A
jamais.
Je
suis ton humanité entière.
J'arrive,
mon amour lancé vers toi, à l'infini
Une
fumée rose s'élève. S'enroule, s'embrasse, s'étreint.
Les
XOOERF ont tenu leur promesse.
Aran
s'est dissout, s'en est allé rejoindre Freebe.
Où,
personne ne le sait....
Peut-être
que chacun ont retrouvé une partie infime de leurs pouvoirs pour
flotter dans une autre galaxie.
Peut-être
que la pluie est l'émotion de leurs retrouvailles.
Peut-être
que le soleil est l'éclair de leur amour....
Peut-être
sont-ils morts à jamais...
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